lundi 20 mai 2013

« A BOUT PORTANT »: Moussa Ag Assarid | ARAWANE EXPRESS

« A BOUT PORTANT »: Moussa Ag Assarid | ARAWANE EXPRESS
« A BOUT PORTANT »: Moussa Ag Assarid

« A BOUT PORTANT »: Moussa Ag Assarid

Il existe dans la crise malienne des personnages qui sont accusés de tous les maux, politiciens, militaires, membres de mouvements, simples citoyens. Arawane Express, journal et non juge, se propose désormais de recueillir leur version des faits, sans porter de jugement, mais sans aucune complaisance. C’est aussi cela notre job.
C’est ainsi que nous avons interrogé Moussa Ag Assarid, Représentant diplomatique du MNLA en Europe. La logique d’objectivité que se veut cette rubrique ne nous autorise pas à commenter.
Bonne lecture.

Moussa Ag Assarid bonsoir : la situation est tendue entre l’armée malienne et le MNLA autour de la ville de Kidal. Comment selon vos mots, décririez-vous la
situation à nous qui sommes loin de Kidal ?Selon mes informations sur le terrain, l’armée malienne n’est pas autour de la ville de Kidal. La région de Kidal est contrôlée par le MNLA, et les éléments de l’armée malienne les plus proches sont dans les villes de Ménaka, Ansongo, Gao, Bourem et Tombouctou.
J’invite les journalistes professionnels à aller avec l’armée malienne et le MNLA sur le terrain pour mener leur travail objectivement avant de diffuser des informations non recoupées et qui s’avèrent souvent non fondées.
Nous avons des informations selon lesquelles les deux Intallah, père et fils (du HCA), seraient sur le point de fixer un ultimatum pour que vous désarmiez. Le deuxième frère Intallah (du MIA) étant dans vos rangs. Cette situation complexe ne vous isole t-elle pas plus ? Vu les derniers propos de Hollande et les préparatifs de l’armée malienne ?
Par principe je ne commente pas des rumeurs.
Comptez-vous sur l’armée française en cas d’attaque de Kidal par les FAMA ? Tiendriez vous longtemps le siège, seuls, surtout si on assiste à une union du HCA, du MAA, et des FAMA qui sont tous vos « ennemis »?
Le MNLA compte comme toujours sur le peuple de l’Azawad dans toute sa différence. Dans l’intérêt de tous les azawadiens nous avons des objectifs et des valeurs humaines que nous défendons avec détermination. C’est ça qui est important. Nos revendications sont légitimes, le monde entier le sait aujourd’hui et avec le temps la vérité triomphera. Nous n’avons une idéologie ni religieuse ni ethnique, nous nous battrons jusqu’au bout pour le bien-être du peuple de l’Azawad dans le respect des droits humains comme nous l’avons toujours fait.
Les Chefs d’Etat Major de la CEDEAO vous demandent aussi de désarmer, vous ne vous sentez vraiment pas isolés, ni en danger ?
Le MNLA ne désarmera que suite à des négociations crédibles et sincères sous l’égide de la communauté internationale avec des garanties sécuritaires pour la population de l’Azawad et son implication directe et permanente dans la gestion de l’Azawad. L’exemple de Ber à 60 kilomètres de Tombouctou, dont les populations sont régulièrement persécutées sans défense par un groupe armé, ne nous s’inspire confiance.

Le MNLA ne déposera donc pas les armes quoi qu’il arrive ?
A ce propos nous nous sommes exprimés récemment dans une lettre ouverte adressée à la communauté internationale.
Quand vous parlez de négociations, vous êtes conscients que les principes de négociation, réconciliation, et réunification ne vont pas sans la justice ? Que feriez-vous de tous les membres du MNLA accusés des crimes les plus atroces ? Les livreriez vous à la justice malienne et /ou internationale ?
Le MNLA a toujours réclamé que tous les coupables soient traduits devant la justice depuis 1963. Que tous ceux qui commettent des crimes répondent de leurs actes quelque soient leurs organisations d’appartenance (armée malienne, MNLA, gouvernements du Mali, etc…). Il faut un tribunal pénal international pour juger de ces crimes sans aucune exception. Justice doit être rendue aux victimes et à toutes les victimes.
Et si certains dirigeants de votre mouvement étaient déclarés responsables, ou coupables de certains crimes odieux, les livreriez vous aussi ?
La Cour Pénale Internationale (CPI) est en train de mener son enquête, laissons la faire son travail. Et le MNLA est en contact avec elle par l’intermédiaire de ses avocats. Et aucun coupable ne doit être protégé quel qu’il soit et d’où qu’il soit.
Existe t-il un problème de leadership entre les membres du MNLA Occident et le MNLA Kidal? Sait-on qui fait quoi?
Il n’y a pas plusieurs MNLA. Il y a un seul MNLA avec plusieurs personnes qui ont des responsabilités et des points de vue qui peuvent être différents, mais les objectifs et l’orientation générale du MNLA sont les mêmes pour tous. Il n’y a donc pas vraiment de problème entre nous. Le mouvement dispose d’organes consultatifs et exécutifs. Il y a un énorme travail et toutes les compétences ont leur place. Il y a par exemple le Conseil Transitoire de l’État de l’Azawad (CTEA) qui est l’organe exécutif, le Conseil Consultatif, le Conseil Révolutionnaire et le Cellule à l’étranger.

Venons-en à votre personne Moussa. La jeunesse malienne vous traite d’ingrat, pour avoir évolué avec elle, dans ce pays, en tant que jeune malien. Et avoir reçu une éducation malienne, avoir milité dans des associations maliennes, et même avoir reçu des prix et financements en temps que malien. Tout est faux ?Je n’ai jamais renié ma fraternité et mon amitié avec quiconque mais j’ai le droit comme tout le monde d’avoir une opinion politique différente et de m’engager dans l’organisation de mon choix. Malheureusement une partie de la jeunesse avec laquelle j’ai grandi ne m’a pas compris, mais avec temps elle comprendra ma position. Je dis bien une partie car un bon nombre de mes anciens camarades de promotion ou de parcours qui ont voyagé comme moi ou qui sont engagés dans des organisations de développement, ou politiques, au Mali, ont bien compris mon engagement et me le disent car nous en parlons régulièrement.
Au sein du MNLA je lutte contre un système corrompu, injuste, clanique et qui a maintenu ma région d’origine dans l’ignorance, le sous-développement, l’insécurité avec la présence d’AQMI depuis 2003 et le trafic de drogue avec des complicités des plus hautes autorités de l’État.
Ce n’est pas parce que j’ai fait une partie de mes études au Mali que je dois me soumettre à ce système. Je suis reconnaissant à tous ceux qui m’ont aidé à un moment ou à un autre de mon parcours de vie. Je leur dis que je suis toujours le même mais qui a grandi et qui a les yeux grandement ouverts sur le monde et sur l’injustice du système d’État du Mali.
Lorsque je me suis volontairement occupé du respect des conventions de Genève et du droit internationales humanitaire et surtout du dossier des centaines de prisonniers de l’armée malienne détenus par le MNLA, je sais ce que je fais et j’apportais ainsi ma contribution au respect des droits humains. J’ai pu avec les autres dirigeants du mouvement écourter les souffrances ces personnes et de leurs proches par l’intermédiaire du CICR et aujourd’hui ils sont tous auprès de leurs familles respectives.
Malheureusement, beaucoup de gens racontent tellement de choses non fondées sur le MNLA. Et je pense qu’il est temps que nous nous disions la vérité.
On vous a vu sur internet récemment entrer dans un cabriolet de luxe. Êtes-vous quelqu’un qui crie à l’injustice mais vit dans l’opulence ? Vos activités au MNLA vous ont-elles rapporté les sommes faramineuses qu’on vous prête ?
J’ai vu cette photo circuler sur internet et certains commentaires malsains de certaines personnes à mon égard. C’est encore injuste. Lors de la cérémonie en France de mon mariage, un ami nous a conduits dans sa voiture pour la circonstance comme ça se fait un peu partout, et des amis ont pris des photos de souvenir. Mes connaissances savent que je ne vis pas dans l’opulence, mais plutôt modestement à la sueur de mon front. En France, n’ayant jamais bénéficié de bourse ni du Mali, ni de la France, ni de quiconque, j’ai durement travaillé pour financer mes études et écrire mes livres en aidant comme je peux mes proches et notre petite école à Taboye.
Mes activités au sein du MNLA sont bénévoles comme pour tous ceux qui sont engagés dans ce mouvement. Et notre rémunération sera le bien-être de la population de l’Azawad dans toute sa diversité.
Certains vont jusqu’à dire que vous avez touché au narcotrafic comme la majeure partie des acteurs armés du Nord. Vous niez cela aussi ?
Je n’ai jamais touché aucun centime d’aucun trafic. Il s’agit là encore des personnes de mauvaise volonté et qui diffusent de la propagande et de haine gratuite sans fondement. S’il y a des personnes qui ont des éléments de preuves de leurs allégations contre les différents groupes armés ou non, du Sud comme du Nord, qu’elles les remettent à la justice.

Maintenant, Moussa, un message à adresser aux dirigeants maliens, à l’armée malienne ? A cœur ouvert ?

Le peuple malien a soif de vérité et en a le droit. Le MNLA n’a pas commis le massacre d’Aguelhoc et a des revendications légitimes, il mérite d’être traité en tant que tel et c’est avec lui qu’il faut faire la paix et cette fois-ci une paix définitive. Le MNLA a respecté tous ses engagements et reste crédible. L’armée malienne doit respecter le droit international humanitaire.
Et pour finir, un message à adresser au peuple malien ?
Le peuple malien mérite respect et reconnaissance malgré toutes les manipulations et propagandes de certains médias maliens et de certains dirigeants qui ne lui ont pas dit la vérité, donc qui l’ont berné.
Le MNLA ne combat aucune ethnie du Mali et n’est pas ethnique. Beaucoup d’injustices ont été commises par les différents régimes qui se sont succédés au Mali depuis 1960 et les victimes méritent que justice leur soit rendue quelles qu’ils soient et d’où qu’ils soient.
Je pense que nous devons tous nous poser la question de pourquoi nous sommes tombés si bas et quelle est la responsabilité de chacun de nous? Acceptons enfin de nous parler et que chacun entende la vérité de l’autre même si elle est différente. Et le temps nous édifiera.
Pour ce qui me concerne personnellement, je reste le pionnier que j’ai toujours été épris de paix, de liberté et de justice. Tout ce que j’ai fait c’est dans la défense de ces trois valeurs humaines qui m’ont été transmises par ma famille et aussi par tous ceux que j’ai côtoyé dans ma vie que ça soit à Intamat, Taboye, Bourem, Gao, Ansongo, Bamako, Angers, Montpellier et Paris.

Propos recueillis par M.M.S

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